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L'enquête sur la famille de Jeanne d'Arc
16 août 1502. |
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tous ceulx qui ces présentes lectres verront et orront.
Thomas de Sinzelles, escuier, garde de par le roy nostre
sire, du scel de la prévosté de Vaucouleur, salut.
Savoir faisons, Pierre Mangeot et Cugny Rouyer, notaires
jurés au roy nostre dict sire en la prévosté et ressort
dudict Vaucouleur, nous ont tesmoingnés et relactés
pour vray, que eulx estant au villaige de Dompremy-sur-Meuse, le mardy seixiesme jour du mois d'aoust l'an mil cinq cens et deux, par Poiresson TALLEVART, demeurant à Marcey-soubs-Brixey.
Leur fut requis de oyr aulcuns d'icelles personnes qu'il
entend d'estre enquis et avoir attestation d'eulx sur ce
que ung nommé Henry BAUDEOT, à son vivant demorant
audict Dompremy, fut joinct par mariage à une nommée Katherinne.
Duquel mariage sont descendus deulx filles, l'une nommée
Jehanne, qui fut mariée à feu messire Pierre DU LYS,
seigneur de Baigneau, près d'Orléans,
Et l'aultre nommé Katherinne, qui fut mariée à feu
Joffroy TALLEVART.
Desquels sire Pierre DU LYS et dame Jehanne sa femme
est venu et descendu ung nommé Jehan DU LYS.
Et du mariage desdicts Joffroy et Katherinne sont
venus et descendus ledict Poiresson TALLEVART et Jehan
TALLEVART, lequel Jehan est allé de vie à trespas soub
environ quattre ans.
Pour et affin de se apparoir et monstrer en temps et
lieux où mestier lui sera, que ledict Poiresson et ledict
feu Jehan DU LYS estoient venus et descendus desdictes
deux soeurs dame Jehanne et Katherinne, et à ce moyen
cousins germains.
A ceste cause a faicte venir par devant lesdicts notaires,
pour dudict cas attester la vérité, ceulx cy après nommés
et premier :
Noble homme Claude DU LYS, demeurant audict Dompremy-sur-Meuse, aagé d'environ cinquante ans, a dict,
affirmé et attesté sur sa loiaulté et conscience que en
son jeusne aaige, peut avoir environ vingt-quatre ans, demoura avec ledict feu Pierre DU LYS, oncle à sa mère
et fille de Jacques DU LYS, grand-père dudict attestant (1), au
lieu de Luminart, près Orléans, environ le temps et espaices
de cinq ans.
Pendant lequel temps il a oy dire par plusieurs et diverses
fois audict feu sire Pierre DU LYS et à ladicte dame
JEHANNE sa femme, que Katherinne femme Joffroy TALLEVART estoit sœur
germaine d'icelle dame Jehanne sa femme, et que si icelle
sa femme alloit de vie à trépas sans hoirs de son corps,
la femme dudict Joffroy TALLEVART ou ses enfants seroient
ses héritiers.
Oultre dit qu'il a bien vue et congnue feux Joffroy
TALLEVART et ladicte Katherinne sa femme demourant à
Marcey-soubs-Brixey, lesquels à leur trépas ont délayssé
Poiresson TALLEVART et Jehan TALLEVART, leurs enfants
et héritiers, seulx et pour le tout : lequel Jehan Tallevart
alla de vie à trespas au mois de janvier de l'an mil quatre
cens quatre-vingt-dix-huit dernier passé.
Et a toujours oy dire à ses ancesseurs et aultres ses voisins
congnoissans la généalogie que icelle dame Jehanne et Katherinne, femme dudict Joffroy, estoient seurs germaines.
Honorable homme Jehan Thiriet, marchand bourgeois,
demourant audict Marcey-soub-Brixey, aagé d'environ
soixante-dix ans, a dit, attesté et affirmé en sa loyaulté et
conscience, qu'il a veu et congneu feu Henry BAUDOT, à
son vivant demourant à Gondrecourt, qui est à trois
lieues dudict Dompremy, assis au bailliage de Chaumont.
Lequel à son trespas délaissa deux filles et héritières,
l'une nommée Jehanne, qui fut mariée à feu messire
Pierre DU LYS, à son vivant chevalier, qui depuis alla demourer à Orléans, duquel mariage est venu et descendu feu Jehan DU LYS. (2)
Et l'autre fille nommée Katherinne fut mariée à Joffroy
Tallevart, lors demourant audict Marcey.
Duquel mariage sont venus et descendus Poiresson Tallevart
et Jehan Tallevart, cousins germains dudict feu
Jehan DU LYS et enffans des deux seurs, lequel Jehan Tallevart,
au mois de janvier dernier passé il y a trois ans,
est allé de vie à trépas.
Dit savoir les choses dessus dictes parce qu'il est natif
dudict Marcey (3), et il a demouré tout son temps jusques à
présent, et veu et congneu lesdicts sire Pierre et dame
Jehanne sa femme demourans audict lieu de Dompremy dont il est prochain, et pareillement lesdicts Joffroy Tallevart
et Katherinne sa femme, et leurs enffans demoréz
audict Marcey.
Claude Gérart, laboureur, demourant à Dompremy-sur-Meuse, natif dudict lieu, aagé d'environ soixante ans, a
dit, affirmé, attesté et certifié qu'il a veue une nommée Katherinne, fille de feu Henry BAUDOT,
qui depuis fut femme de Joffroy Tallevart, demourant à
Marcey-soub-Brixey.
Et aussy a veu et congneu feux messires Pierre DU LYS et Jehan DU LYS son fils, parents à la Pucelle, parce que
les a veu audict Dompremy, traverser, venir et aller en
leur maison pour ce que la mère dudict attestant estoit prochaine de lignaige de la femme dudict Joffroy TALLEVART
et de dame Jehanne femme dudict messire Pierre
DU LYS et mère dudict Jehan DU LYS, mais il n'est pas
recors qu'il ait veue ladicte dame Jehanne.
Mais en a oy dire à ses dicts père et mère et audicts
messires Pierre du Lys et Jehan du Lys son fils, que ladicte
Jehanne estoit seur germaine à ladicte Katherinne, et que icelle dame Jehanne et Katherinne, seurs, estoient
prochaines parentes de ses dicts père et mère.
Dict aussy qu'il a congneu ung nommé Jehan DU LYS, à son vivant, frère de ladicte Jehanne LA PUCELLE et dudict
sire Pierre DU LYS, prévost de Vaucouleur, lequel
venoit aucunes fois de Vaucouleur audict Dompremy, et
hantoit à cause de parentaige en leur maison.
Et a oy dire audict Jehan DU LYS que ladicte Catherine
et dame Jehanne estoient seurs; et que ledict sire Pierre
et dame Jehanne n'avoient synon ung fils nommé Petit-Jehan DU LYS, qui estoit peu de chose (2).
Et que s'il alloit de vie à trépas, la femme dudict Joffroy
TALLEVART seroit héritière de la dame Jehanne sa
seur.
Didier de Monts, laboureur, maire de Greux, aaigé de
moins soixante-cinq ans, a dit, attesté et certifié qu'il est
natif de Dompremy où il a toujours demoré, synon depuis
six ou sept ans qu'il est allé demourer audict Greux. Et que luy estant en son jeusne aaige de vingt ans, il a
plusieurs foix conversé avec ung nommé Esselin, fils le
maire Mongetz, dudict Dompremy, qui demandait à avoir
en mariage une nommée Katherinne, fille de Poiresson
TALLEVART, fils dudict Joffroy, et que celui-cy en devisant,
entre autres choses, leur dit que Katherinne sa femme estoit seur de dame Jehanne,
femme de feu messire Pierre DU LYS, et que leur lignaige estoit quasi tous gentilz gens (4) à cause de feu Jehanne la
Pucelle, par quoy ils en estaient favorisés en beaucoup
de lieux.
Apparu Jacquart, laboureur, demourant à Greux, près
Dompremy, aaigé d'environ soixante ans, a dit, attesté et
certifié sur sa conscience, qu'il a veu et congneu Catherine et dame Jehanne seurs
germaines, il a oy dire à son père et à sa mère qu'elles
estoient filles de Henry BAUDOT, lequel Henry a aucune
fois demoré au lieu de Dompremy et au lieu de Gondrecourt.
Et dit qu'icelles filles furent mariées, c'est assavoir laditte
Katherinne à ung nommé Joffroy TALLEVART... et
l'autre fille nommée Jehanne, à feu messire Pierre DU
LYS et le dict sçavoir pource qu'il a congneu les parties et veu passer et repasser lesdict feux messire Pierre DU
LYS, laditte dame Jehanne sa femme et ledict feu Jehan
DU LYS leur fils.
Et disoient les gens par devant qui ils passoient que
ledict feu messire Pierre DU LYS estoit frère à LA PUCELLE.
Vaultherin, cousturier, demorant audict Marcey-soub-Brixey, aaigé d'environ cinquante-cinq ans, a dit, affirmé
et attesté en sa loyaulté et conscience qu'il a bien veu et congneu Joffroy TALLEVART et Katherinne sa femme...
Dit que l'année après la Journée de Nancy où le duc de
Bourgongne fut mort (1478) (5), il vit feu Jehan DU LYS (6), seigneur
de Baigneaux, près d'Orléans, venir en la maison
feu Joffroy TALLEVART, audict lieu de Marcey, pour avoir ung cheval et pour ce qu'il ne trouva pas son cas, il s'en
vint à la maison de feu Jehan THIERSELIN audict Dompremy
où il en trouva ung.
Auquel Jehan DU LYS, luy estant en la maison dudict
Joffroy TALLEVART, il oyt dire et recongnoistre que dame Jehanne sa mère et Katherinne, femme dudict Joffroy
estoient soeurs germaines, et luy fit ledict Joffroy grant
recueil pour ce qu'il estoit nepveu de sa femme.
Jacob Brunet, laboureur, demorant audict Dompremy,
aaigé d'environ soixante et dix ans, a dit, afirmé et attesté
qu'il a veu et congneu feu Henry BAUDOT et Katherinne
sa femme, qui demorérent longtemps audict Dompremy,
et pour les guerres s'en allèrent demorer à Gondrecourt.
Du mariage desquels sont descendus Katherinne et
Jehanne leurs filles : l'une desquelles, cest assavoir laditte
Jehanne, fut mariée à feu messire Pierre DU LYS, à
son vivant chevallier, demorant à Orléans, lesquels eurent en leur mariage un fils nommé Jehan DU LYS.
Et iceulx messire Pierre, dame Jehanne sa femme et ledict
Jehan DU LYS a vu hanter en son jeusne aaige audict
Dompremy (avant 1450)...
Mougeon Rendelz, laboureur, demorant à Greux, aaigé
d'environ soixante ans, a dit, attesté et certiffié qu'il a
veu feu Joffroy TALLEVART et Katherinne sa femme demorant à Marcey-soub-Brixey, d'où sont venus Poiresson
et feu Jehan TALLEVART.
Et dit qu'il a veu COLLIN Le Maire, fils de Jehan COLLIN, à son vivant maieur dudict Greux, frère de sa mère, lequel
avait eu épousée la soeur de La Pucelle (7), comme il
a oy dire à son dit oncle.
Dit aultre qu'il a oy dire à icelluy son oncle souventes
foix que dame Jehanne, femme de feu messire Pierre DU
LYS, et Katherinne, femme de Joffroy Tallevart, estoient
seurs germaines.
Et touttes ces choses ont lesdits attestans chacun par
soy certiffiées et affirmées en leurs loyaultés et consciences,
estre vrayes. De toutes lesquelles choses dessus dictes et
d'une chacune d'icelles, ledit Poiresson Tallevart a quis
et demandé auxdicts notaires royaulx avoir lectres d'attestations ou instruments ung ou plusieurs, pour luy valloir
et servir ce que raison devra. Ce que lesdicts notaires luy
ont octroié en ceste forme, en tant que faire le povoient
et devoient.
En tesmoing de vérité, nous, garde du scel dessus
nommé, à la relation desdicts jurés, leurs scel et seings
manuels mis à ces présentes lectres d'attestations ou instruments,
avons scellé icelles du scel de ladicte prévosté
et de nostre scel en contrescel, saulfs tous droits.
Ce fut faict l'an, jour et lieux que dessus.
Signé : MENGEOT et ROUTER, avec paraphe.
Source
: "La famille de Jeanne d'Arc" E.Debouteiller et G. De Braux - 1878, p.251 et suivantes.
La découverte de cette pièce est due à la sagacité du savant
Orléanais M. Boucher de Molandon.
Notes :
1 Claude DU LYS, procureur fiscal des seigneuries
de Greux et Domremy, né vers 1450, mort
vers 1525, épousa Nicole THIESSELIN, de Trécy. Ils eurent huit filles.
- Claude Du Lys parle là de Jacquemin d'Arc, frère aîné de Jeanne d'Arc dont la fille (appelée Jeanne) a épousé son oncle Jean d'Arc, deuxième frère de la Pucelle. Ce qui tend à prouver que Jacquemin d'Arc a bien eu une descendance et qui explique pourquoi il est le grand'père de Claude du Lys (ndlr).
2 Jean DU LYS fils unique de Pierre (jeune frère
de la Pucelle) et de Jeanne BAUDOT est déjà décédé en 1502. (ndlr)
3 Maxey sur Meuse aujourd'hui, face à Domrémy, sur l'autre rive de la Meuse.
4 Gentilz : nobles.
5 Charles le Téméraire, duc de Bourgogne et fils de Philippe Le Bon, né le 10 novembre 1433, mort à la bataille de Nancy le
5 janvier 1477. Louis XI annexera ensuite la Bourgogne.
6 Donc le fils de Pierre d'Arc, jeune frère de la Pucelle.
7 Une des phrases importantes de cette enquête, où est mentionné que Jeanne a bien eu une soeur (nommée Catherine), laquelle s'est mariée avec Colin maire de Greux, qui a lui-même déposé au procès de réhabilitation ! Il est dommage que son témoignage se soit borné à répondre aux points du questionnaire sans mentionné qu'il était veuf de Catherine d'Arc. (ndlr)
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