Minutes de Michel de Berry, notaire du Duc d'Orléans à Beaugency.
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'an de Nostre Seigneur mil quatre cent vingt huit, le jour de la passion Saint-Fermain en septembre (1), fut la ville chastel et pont de Baugency renduz en l'obéissance du roy d'Angleterre, en la personne du feu conte de Salisbury, lors lieutenant du roy d'Angleterre, qui fut tué d'un canon tantost après ladite reddicion devant le portereau d'Orléanz, en la Sauloigne. La quelle redicion se fist par Jehan Girart, Dennis de Saint-Savin, Pierre Chèvre, Anthoine du Clus et Remonet le Borne, cappitaines de gens d'armes et de trait, alors estant en garnison audit Baugency pour Monseigneur le Duc d'Orléans. Et pour icelle recevoir, ledit feu conte mist à finace et à composicion les habitans d'icelle ville à la somme de onze cents saluz d'or, chacun saluzt valent vingt deux sous parisis de forte monnoye, marc d'argent valant sept livres dix sous tournois, et quarante muys de grain, mesure dudit Baugency, que lesdiz habitans ont paiez, comme plus applain peut apparoir par les traittiez sur ce faiz et passez par moy, Michel de Berry, notaire de mondit seigneur le duc.
Item. Le jeudy quinziesme jour de juing, l'an mil quatre cent vingt neuf, après Pasques ensuivant, fut le siège des Françoys mis devant Baugency, par Monseigneur le Duc d'Alançon, Monseigneur de Vendosme, Monseigneur le Bastart d'Orléans, Monseigneur de Richemont, connestable de France, Jehanne la Pucelle, et par plusieurs autres grands seigneurs, barons, chevaliers, escuiers, cappitaines de gens d'armes et de trait, jusques au nombre, comme on estimet, à dix huit mille hommes. Esquelles places estoient les Anglois, c'est assavoir, Pierre Beauchamp, cappitaine illec pour le sire de Tallebot, six chevaliers d'Angleterre, et de trois à quatre cents hommes combatens, Anglois. Les quelles places furent rendues en l'obéissance du roy de France, nostre sire, le samedi ensuivant, dix-septiesme dudit moys de juin mil quatre cent ving-neuf. Et se mesme jour furent la ville et le chastel de Meung désamparez des Anglois, qui estoient de six à sept cens combatens; et les jours précédens, la ferté Hubert.
Item. Que le dit jour de samedi, après lesdites reddicions, les Anglois, assemblez jusques au nombre de trois mille, se tornèrent à aler de Meung à Yenville, qui lors estoit en leur subjection. Et entre Patay et Yemville furent aconsceuz (2). Lesquelz Anglois se misdrent en bataille, en laquelle se férirent les Françoys, et misdrent en fuie les Anglois; et en fut tués entre ledit Patay et prins prisonniers deux mille sept cents, et trois cents qui en réchappèrent. Et fut Yenville rendu françoys.
Item. La sepmaine précédent lesdits jours, Jargueau fut prix sur les Anglois d'assault, et y fut pris le conte de Suffort et l'un de ses frères, et l'autre tué. Et y mourut à l'assault de six à sept cents Anglois.
Item. Le premier jour de may (3) l'an desus dit, le siège d'Orléans fut levé par lesdits François et la Pucelle. Et furent prises deux bastilles : celle de Saint-Loup et celle du chief du pont d'Orléans, et y fut noyé Glacidial (4), gouverneur. Esquelles bastilles prandre, et le siège devant ladite ville, a été tué et mors de trois à quatre mille Anglois, Tallebot pris, Scalles et plusieurs grans seigneurs d'Angleterre : [dont chacun est ?] esmerveillé.
Source
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- Texte original : Vallet de Viriville - Chronique de Charles VII de Jean Chartier (publiée en 1858), t.III p. 208 à 211.
Notes :
1 La saint-Firmin, 25 septembre.
2 C'est à dire furent rejoints. L'infinitif de ce verbe est "aconsuivre".
3 Erreur du notaire, le siège ne fut levé que le 8 mai.
4 William Glasdale.
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