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Chronique
de Perceval de Cagny -
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7 - L'assaut de Gergeau |
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n celui an MCCCCXXIX, le samedi XI° jour du mois de juing environ
deux heures après disner, le duc d'Alençon, la Pucelle,
le conte de Vendosme et les autres cappitaines, en leur compaignie
de II à III mille combatant et autant de gens de commun ou
plus, vindrent assegier la ville de Gergueau en laquelle estoient
le conte de Sufford, deux de ses frères et de vii à
viiic Englois. A l'arrivée, les gens de commun à qui
il estoit advis que à l'entreprinse de la Pucelle riens ne
povoit tenir, ilz saillirent ès fossez sans sa présence
et sans les gent d'armes qui entendoyent à eulx logier. Il
en y ot de bien batuz et s'en revindrent. La chose demoura pour
le jour en cet estat. La nuit, la Pucelle parla à ceulx de
dedens et leur dit : "Rendez la place au Roy du ciel et au
gentilz roy Charles, et vous en alez, ou autrement il vous mescherra."
Ilz ne tindrent compte de choses qu'elle leur dist. La nuit, les
bombardes et cagnons furent assis, et le dimenche venu, environ
IX heures au matin, la Pucelle et le duc d'Alençon firent
sonner les trompilles pour venir à l'assault. La Pucelle
print son estendart ou quel estoit empainturé Dieu en sa
majesté, et de l'austre costé (1) ... et ung escu de France tenu par deux anges. Elle vint sur les fossez, et incontinent bien grant nombre de gens d'armes
et de commun saillirent dedens et commença l'assault très
dur, lequel dura de trois à quatre heures. Et en la parfin
la place fut prinse, qui sembloit chose impossible la prendre d'un
assault, vu les gens de deffence qui estoient dedens. Et n'y mourut
de nostre costé que XVI ou XX personnes. Le conte de Suford
fut prins à prinsonnier, ung de ses frères et XL ou
L autres ; son autre frère et le seurplus des Englois furent
mis à mort.
Le lundy ensuivant, la Pucelle, le duc d'Alençon,
après ce que ilz eurent ordonné ce que bon leur sembla
de gens pour la garde de la place de Gergueau, eulx et le seurplus
de leur compaignie s'en vindrent disner en la ville d'Orléens
et ès villages d'ung costé et d'autre de la rivière,
et là séjournèrent celui jour et l'endemain
qui fut mardi. Ce jour la Pucelle fut moult grandement festoiée
de ceulx de la ville. Le duc d'Alençon, touz les autres capitaines,
chevaliers et escuiers, gens de guerre, bourgois et toutes gens
de commun qui l'avoient veue, estoient tant contens d'elle que plus
ne povoient, disans que Dieu l'avoit envoyée pour remetre
le roy en sa seignourie. Au vespre elle appela son beau duc d'Alencon
et lui dist : "Je vueil demain après disner aler
veoir ceulx de Meun. Faites que la compaignie soit preste de partir
à celle heure." Le merquedi ensuivant, la Pucelle,
le duc d'Alençon, leur compaignie et bien grant nombre de
commun qui se misdrent en la compaignie de la Pucelle, partirent
après disner et alèrent gesir auprès de Meun.
Et à l'arriver fut donnée une escharmouche à
ceulx de la place, et plus n'en fut fait.
En cet an MCCCCXXIX, le samedi XIe jour du
mois de juin, environ deux heures après dîner, le duc d'Alençon, la
Pucelle, le comte de Vendôme et les autres capitaines, ayant en leur
compagnie de deux à trois mille combattants, et autant de gens des milices communales ou plus, vinrent assiéger la ville de Jargeau, que gardaient
le comte de Suffolk, deux de ses frères, et de sept à huit cents Anglais.
A l'arrivée, les gens des milices communales, à qui il était avis que rien ne
pouvait tenir contre les entreprises de la Pucelle, se précipitèrent dans
les fossés sans qu'elle y fût présente, et sans les gens d'armes occupés à
se loger : il y en eut de bien battus ; ils se retirèrent. La chose demeura
en cet état pour ce jour.
La nuit, la Pucelle parla à ceux de dedans la ville, et leur dit : « Rendez la place au Roi du Ciel et au gentil roi Charles, et vous en allez,
ou autrement il vous mécherra ». Ils ne tinrent pas
compte des choses qu'elle leur dit. La nuit, les canons et les bombardes
furent assis, et le dimanche venu, environ sur les neuf heures du matin,
la Pucelle et le duc d'Alençon firent sonner les trompilles pour venir à
l'assaut. La Pucelle prit son étendard, auquel était peint Dieu en sa majesté, et
de l'autre côté... et un écu de France tenu par deux anges. Elle vint
sur les fossés, et incontinent un bien grand nombre de gens d'armes et
d'hommes des communes s'y précipitèrent, et l'assaut commença très dur ;
il dura de trois à quatre heures. En la parfin, la place fut prise, quoiqu'il
semblât impossible de la prendre d'assaut, vu les défenseurs qu'elle
renfermait. De notre côté nous n'eûmes que seize ou vingt morts. Du côté
de l'ennemi, le comte de Suffolk, son frère, et quarante ou cinquante
autres furent faits prisonniers ; son autre frère et le reste des Anglais
furent mis à mort.
Le lundi qui suivit, la Pucelle, le duc d'Alençon, après avoir ordonné
pour la garde de Jargeau le nombre de gens qu'il leur sembla bon, s'en
vinrent dîner, eux et ce qui restait de leur compagnie, en la ville d'Orléans et aux villages situés sur l'un et l'autre côté de la rivière.
Ils séjournèrent ce jour et le lendemain qui fut mardi. Ce jour, la
Pucelle fut très grandement festoyée par ceux de la ville. Le duc
d'Alençon, tous les autres capitaines, chevaliers, écuyers, gens de guerre,
bourgeois, tout les gens du commun qui l'avaient vue, en étaient si contents
que plus ils ne pouvaient l'être, disant que Dieu l'avait envoyée pour
remettre le roi en sa seigneurie. Dans la soirée elle appela son beau duc d'Alençon et lui dit : « Je veux
demain après dîner aller voir ceux de Meung. Faites que la compagnie
soit prête à partir à cette heure-ci. » Le lendemain, mercredi, la Pucelle, le
duc d'Alençon, leur compagnie, et un bien grand nombre de gens du
peuple, qui se mirent en la compagnie de la Pucelle, partirent après
dîner et allèrent coucher auprès de Meung. A l'arrivée une escarmouche
fut donnée à ceux de la place, et il n'en fut pas fait davantage.
Sources
: Jules Quicherat
- "Bibliothèque de l'école des Chartes, t.II,
2° série, p.143 - 1845-46" et "Procès
de condamnation et de réhabilitation de la Pucelle"
t.IV, p.1 à 37.
Illustration :
- Peinture murale de Lenepveu au Panthéon ("La
grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc" - H.debout,
4° éd.1922).
Notes :
1 Lacune dans la copie, suppléez par l'image de Nostre-Dame
comme ci-dessus.
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