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26 avril 2024  

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Procès de condamnation - actes postérieurs
Lettre d'Henri VI aux prélats et nobles de "son" royaume de France - 28 juin 1431

     "Révérend père en Dieu. Il est d'assez commune renommée, déjà divulguée partout, comment la femme qui se faisait appeler Jeanne la Pucelle, erronée devineresse, s'était, il y a deux ans et plus, contre la loi divine et l'état de son sexe féminin, vêtue d'habit d'homme, chose abominable à Dieu ; et, en cet état, elle s'était transportée vers notre ennemi capital, auquel et à ceux de son parti, gens d'églises, nobles et populaire, elle donna souvent à entendre qu'elle était envoyée de par Dieu, se vantant présomptueusement qu'elle avait souvent communication personnelle et visible avec saint Michel, une grande multitude d'anges et de saintes du Paradis, comme sainte Catherine et sainte Marguerite. Et par ses faussetés qu'elle donnait à entendre, par l'espérance qu'elle suscitait de victoires futures, elle retira plusieurs cœurs d'hommes et de femmes de la voie de la vérité, elle les convertit à fables et à mensonges. Elle se vêtit aussi d'armures, comme les portent chevaliers et écuyers, leva étendard ; et par trop grand outrage, orgueil et présomption, elle demanda à avoir et à porter les très nobles et excellentes armes de France, ce qu'elle obtint en partie. Et elle les porta en plusieurs conflits et assauts, ainsi que ses frères, à ce qu'on dit : c'est à savoir un écu à champ d'azur, avec deux fleurs de lis d'or, et une épée, la pointe en haut férue en une couronne. En tel état elle s'est mise aux champs, a conduit gens d'armes et de trait, en troupes et à grandes compagnies, pour faire et exercer d'inhumaines cruautés, en répandant le sang humain, en faisant séditions et commotions de peuples, en les induisant à parjures et à pernicieuses rebellions, à superstitions et à fausses croyances, en perturbant toute vraie paix et en renouvelant guerre mortelle, en souffrant que plusieurs l'adorassent et la révérassent comme sainte femme, et en besognant damnablement en divers autres cas trop longs à exprimer, mais qui toutefois ont été assez connus, en plusieurs lieux, ce dont presque toute la chrétienté a été fort scandalisée (1).
  Mais la divine puissance, prenant pitié de son peuple loyal, ne l'a longuement laissé en péril et n'a point souffert qu'il demeurât dans les crédulités vaines, périlleuses et nouvelles où il se mettait si légèrement : elle a permis, par sa grande miséricorde et clémence, que ladite femme fût prise devant Compiègne et mise en notre obéissance et domination.
  Et , dès lors, nous fûmes requis par l'évêque du diocèse où elle avait été prise, de la lui faire délivrer, en tant que notée et diffamée de crime de lèse-majesté divine, comme à son juge ecclésiastique. Nous, autant par révérence pour notre mère sainte Eglise, dont nous voulons préférer les saintes ordonnances à nos propres faits et volontés, ainsi que de raison, que pour l'honneur aussi et l'exaltation de notre dite sainte foi, lui fîmes bailler ladite Jeanne afin de lui faire son procès ; car nous ne voulions pas que les gens et officiers de notre justice séculière en prissent aucune vengeance ou punition, ainsi qu'il nous était licite de le faire raisonnablement, attendu les grands dommages, les inconvénients, les horribles homicides, les détestables cruautés et autres maux innombrables qu'elle avait commis contre notre seigneurie et notre loyal peuple obéissant. Cet évêque, adjoint avec lui le vicaire de l'inquisiteur des erreurs et des hérésies, appelés avec eux un grand nombre de maîtres solennels et de docteurs en théologie et en droit canon, commença, en grande solennité et et gravité bien due, le procès de cette Jeanne. Et, après que lui et ledit inquisiteur, juges en cette partie, eurent, par plusieurs et diverses journées, interrogé ladite Jeanne, ils firent mûrement examiner ses confessions et assertions par lesdits maîtres et docteurs, et de façon générale par toutes les Facultés de notre très chère et très aimée fille l'Université de Paris, par devers laquelle lesdites confessions et assertions avaient été envoyées. Suivant ces opinions et délibérations, les juges trouvèrent cette Jeanne superstitieuse, devineresse, idolâtre, invocatrice de démons, blasphématrice envers Dieu, ses saints et ses saintes, schismatique et errant beaucoup en la foi de Jésus-Christ.
  Et pour la réduire et ramener à l'union et communion de notre dite mère sainte Église, la purger de si horribles, détestables et pernicieux crimes et péchés, pour guérir et préserver son âme de la perpétuelle de damnation, elle fut souvent, et bien longuement, très charitablement et doucement admonestée afin que, toutes erreurs par elle répétées et mises en arrière, elle voulût humblement retourner à la voie et au droit sentier de la vérité ; autrement elle se mettait en grave péril d'âme et de corps.
  Mais le très périlleux et déjà signalé esprit d'orgueil et d'outrageuse présomption, qui s'efforce toujours de vouloir empêcher et perturber l'union, et sûreté des loyaux chrétiens, occupa tellement et tint en ses liens le cœur de cette Jeanne que, pour aucune saine doctrine ni conseil, ni autre douce exhortation qu'on lui administrât, son cœur endurci et obstiné ne voulut s'humilier ni s'amollir. Mais souvent elle se vantait que routes les choses qu'elle avait faites étaient bien faites, qu'elle les avait faites du commandement de Dieu et desdites saintes vierges qui lui étaient apparues visiblement ; et, qui pis est, elle ne reconnaissait et ne voulait reconnaître sur terre que Dieu seulement, et les saints du Paradis, en refusant et reboutant le jugement de notre Saint-Père le pape, ceux du concile général et de l'Église militante universelle. Or les juges ecclésiastiques voyant son esprit, par si long espace de temps, endurci et obstiné, la firent amener devant le clergé et le peuple assemblés en très grande multitude : en leur présence, ses cas, crimes et erreurs, furent solennellement et publiquement prêchés, exposés et déclarés par un notable maître en théologie, pour l'exaltation de notre dite foi chrétienne , l'extirpation des erreurs, l'édification et l'amendement du peuple chrétien ; et, de nouveau, elle fut charitablement admonestée de retourner à l'union de sainte Église, de corriger ses fautes et erreurs. Sur quoi elle demeura encore opiniâtre et obstinée.

   

  Et ce considérant, les juges dessusdits procédèrent à prononcer la sentence contre elle, en tel cas introduite de droit et ordonnée. Mais avant que cette sentence ne fût entièrement lue, elle commença,  à ce qu'il semblait, à muer son courage, disant qu'elle voulait retourner à sainte Église. Ce que volontiers et joyeusement ouïrent ses juges et le clergé dessusdits, qui la reçurent bénignement à cela, espérant que par ce moyen son âme et son corps seraient rachetés de perdition et de tourment.
  Alors elle se soumit à l'ordonnance de sainte Église, révoqua de sa bouche et abjura publiquement ses erreurs et détestables crimes, signant de sa propre main la cédule de ladite révocation et abjuration ; et comme notre mère sainte Église se réjouit de ce que la pécheresse fait pénitence,voulant ramener, avec les autres, la brebis égarée qui s'est fourvoyée par le désert, elle condamna cette Jeanne à la prison pour faire pénitence salutaire. Mais guère n'y fut que le feu de son orgueil, qui semblait être éteint en elle, ne s'embrasât de flammes pestilentielles sous les souffles de l'Ennemi ; et bientôt retomba la malheureuse femme dans les erreurs et fausses folies qu'elle proférait auparavant, et qu'elle avait depuis révoquées et abjurées, comme dit est. C'est pourquoi, suivant ce que les jugements et institutions de sainte Église ordonnent, pour que dorénavant elle ne contaminât les autres membres de Jésus-Christ, elle fut de nouveau prêchée publiquement, et, comme étant retombée à ses crimes et fautes accoutumés, elle fut délaissée à la justice séculière qui, incontinent, la condamna à être brûlée. Or voyant approcher sa fin, elle reconnut pleinement et confessa que les esprits qu'elle disait lui être apparus si souvent étaient mauvais et mensongers, que la promesse que ces esprits lui avaient faite de la délivrer était fausse ; et ainsi elle confessa qu'elle avait été moquée et déçue par ces esprits.
  Ici fut l'issue de ses œuvres, telle fut la fin de cette femme ! Et nous vous la signifions présentement, révérend père en Dieu, pour vous informer véridiquement de cette matière ; afin que, dans les lieux de votre diocèse où bon vous semblera, par prédications publiques (2) ou autrement vous fassiez notifier ces choses pour le bien et l'exaltation de notre dite sainte foi, pour l'édification du peuple chrétien qui a été longuement décu et abusé à l'occasion des œuvres de cette femme. Ainsi vous pourrez pourvoir comme il appartient à votre dignité, à ce que nul, parmi le peuple qui vous est confié, n'ait l'audace de croire légèrement de telles erreurs et périlleuses superstitions, particulièrement en ce temps présent, dans lequel nous voyons se dresser plusieurs faux prophètes et semeurs de damnables erreurs et folles croyances, levés contre notre sainte mère sainte Église par folle hardiesse et outrageuse présomption, et qui pourraient peut-être contaminer le peuple chrétien du venin de fausse croyance si Jésus-Christ, en si miséricorde, n'y pourvoyait, et si vous
et ses ministres, comme il leur appartient, n'entendiez diligemment rebouter et punir les volontés et folles hardiesses de ces hommes réprouvés.
  Donné en notre ville de Rouen, le 28° jour de juin 1431. (3)



                                                 


Sources : "Condamnation de Jeanne d'Arc" de Pierre Champion (1921), "Procès de Jeanne d'Arc" - E.O'Reilly (1868), "La minute française des interrogatoires de La Pucelle" - P.Doncoeur (1952)
Texte mis en Français moderne.

Notes :
1 A part les pays d'obédience anglo-bourguignonnes, les rapports et lettres de cette époque qui nous sont parvenues montrent que les déroutes anglaises ont plutôt réjoui la chrétienté, y compris les pays neutres.

2 L'inquisiteur Jean Graverent prononcera le 4 juillet 1431 à Paris un sermon dans lequel il parlera de la fin de Jeanne d'Arc.

3 C'est toujours un tissu de mensonges mais bien que de nombreuses parties soient copiées sur la lettre du 8 juin, on ne reconnait pas dans celle-ci le style mielleux et pompeux de Cauchon.
Ces lettres se retrouveront chez les chroniqueurs bourguignons Chastelain et Monstrelet.



Procès de condamnation

Présentation :

- L'organisation du tribunal
- Les sources existantes
- Plan chateau de Rouen
- La prison de Jeanne

Procès :
- Procès


Complément :
- Etude de l'abjuration
- Lettres de garantie




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