Chronique d'Enguerrand de Monstrelet - index L.II-104 - Comment le seigneur de Barbazan mist le siège devant le chastel d'Anglure que tenoient les gens du duc de Bourgongne.

n cest an, le seigneur de Barbazan, qui le plus du temps se tenoit avec le duc de Bar ès marches de Champaigne, mist le siège devant le chastel d'Anglure (1), que tenoient les gens du duc de Bourgongne. Et en estoit capitaine ung nommé...... (2) qui diligamment le deffendi. Mais par continuacion furent fort approu-chiés et combatus, tant de canons comme d'aultre artillerie. Et entre tant que ce se faisoit, en furent les nouvelles portées au duc de Bethfort, lequel, pour lever ledit siège, y envoia le conte d'Arondel, l'enfant de Warwich, le seigneur de l'Isle-Adam, le seigneur de Chastillon, le seigneur de Bonneul et aultres capitaines, à tout seize cens combatans ou environ. Lesquelz, par aulcuns jours, chevaulchèrent tant, qu'ilz vinrent assez près dudit lieu d'Anglure, où ilz trouvèrent ledit seigneur de Barbazan. Lequel, sachant leur venue, s'estoit desjà retrait en ung lieu qu'il avoit fortifié assés à son advantaige. Si y eut entre les parties aulcunes escarmuches, èsquelles furent mors de seize à vingt hommes d'entre eulx, et ledit seigneur de l'Isle-Adam y fut blécié. Et pour ce que les Anglois et Bourguignons veirent que bonnement sans trop grand dangier ne povoient combattre leurs ennemis, ilz tirèrent leurs gens hors de la forteresce, avec la dame du lieu, et cachèrent le feu dedens (1). Et après ce, se retrayrent vers Paris et ès lieux dont ilz s'estoient partis.

  Ledit seigneur de Barbazan avoit esté commis de par le roy Charles de France gouverneur et capitaine des pays de Brie, de Laonnois et de Champaigne, et avant qu'il asségeast Anglure, avoit conquis Norinville en Laonnois, Voisines et aultres pluiseurs places. Et fut audit siège d'Anglure environ ung mois. Si estoient avec lui le seigneur de Conflans, messire Jehan, bastard de Dampierre, et grand nombre de communes. Et quand ce vint que les Anglois et Bourguignons dessus nommés vindrent pour lever ledit siège, à une escarmuche que firent les asségiés, gaignièrent les François ycelle forteresce. Mais prestement fut reconquise par les desusdiz Anglois, et pour ce fut elle mise en feu et en flambe et du tout démolie, comme dit est desus.

                                                 

Source : La chronique d'Enguerrand de Monstrelet - Tome IV (L.Douët d'Arcq - 1860)

Notes :
1 « Et mirent le feu dedans. » (Vér.)