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La chronique du Bourgeois de Paris - index

e toutes les chroniques, voici la plus haineuse à l'endroit de la Pucelle, et celle où, jusqu'à notre siècle, les historiens ont puisé le plus largement, lorsqu'ils ont eu à parler de la tentative contre Paris et de la fin de la Martyre. Elle était connue sous le titre de Journal d'un Bourgeois de Paris.
Les laborieuses et sagaces recherches de l'éditeur, M. Tuetey, sont parvenues à lever le voile de l'anonyme. L'auteur du Journal n'est pas un bourgeois, mais un ecclésiastique universitaire de l'époque, Jean Chuffart. Les inductions de M. Tuetey semblent concluantes. Elles sont tirées du Journal même et de ce que par ailleurs diverses archives ont fait connaître sur Jean Chuffart. Voici un résumé des indications de M. Tuetey, complété par quelques recherches particulières.
  Né à Tournay, Chuffart ne partagea pas les sentiments français de sa ville natale. Aussi, ayant voulu s'y rendre en novembre 1429, y fut-il mis en prison comme anglo-bourguignon; il en coûta 500 couronnes d'or à son père pour le faire rendre à la liberté. A cette date, Jean Chuffart était un des premiers personnages du monde ecclésiastique de Paris, où très vraisemblablement il était venu d abord pour ses études. Son lieu d'origine l'attachait à la nation de Picardie, et il était de la faculté des décrets, c'est-à-dire de la nation et de la faculté les plus dévouées au Bourguignon. Maître ès arts, il avait eu en 1421 son quartier de rectorat. Licencié ès lois, chanoine de Notre-Dame, il obtint après Gerson le titre de chancelier du chapitre, ce qui le faisait en même temps chancelier de l'Université, charge éminente, « sur laquelle, écrivait Machet le confesseur du roi, repose le poids des bonnes études de l'Université tout entière ». Chuffart était si inférieur à sa charge que Machet le pressa très vivement de la résigner. Chuffart avait promis, mais il ne se hâta pas de remplir sa promesse, si tant est qu'il n'ait pas différé jusqu'à la mort.
  Cela nous donne droit de supposer que la politique, plus que le mérite, aura porté Chuffart à cette haute dignité. Il en fut investi le 29 août 1429, après la mort de Gerson. Il a dû en exercer les fonctions longtemps avant, car, depuis le concile de Constance, Gerson, abhorré de ses confrères de Paris, n'aurait pas pu sans péril rentrer dans la capitale. Chuffart exerçait une autre chancellerie ; il était chancelier de la reine Isabeau de Bavière. Il semble avoir été un de ses conseillers les plus écoutés, puisque l'odieuse reine l'institua un des exécuteurs actifs et non seulement honorifiques de ses volontés testamentaires.
  Parlant des Armagnacs, Jean Chuffart nous dit qu'ils revenaient de leurs excursions troussés de biens comme un hérisson de pommes. On peut lui retourner la comparaison, et dire qu'il fut troussé de bénéfices ecclésiastiques comme un hérisson de pommes : chancelier de Notre-Dame, chanoine et même doyen de Saint-Germain-l'Auxerrois, chanoine de Sainte Opportune, chanoine et doyen de Saint-Marcel, curé de Saint-Laurent, curé de Sainte-Opportune. Sans doute que des prêtres à portion congrue remplissaient les fonctions du titulaire, qui se réservait le gros des revenus. C'était un des révoltants abus de l'époque.
  Cela ne suffit pas à son ambition, puisque, après la rentrée de Charles VII, en 1437, il parvint à se faire nommer conseiller clerc au parlement. L'on ne s'étonne pas de trouver souvent dans les registres du chapitre le nom d'un personnage de telle amplitude.

  Chuffart tenait son Journal. Il commence à l'année 1408 et ne se ferme qu'en 1449. C'est le « journal de Paris » durant toute cette période. Les événements qui se passent au dehors n'y sont mentionnés qu'à cause de leur contrecoup sur la capitale; rien ne nous fait mieux connaître la physionomie de la ville à cette époque. En un style sans prétention, parfois énergique et pittoresque, plus souvent trivial, bas jusqu'à la grossièreté, la gazette mentionne en quelques mots les événements politiques et religieux, le prix des denrées, les épidémies, la température, les récoltes, les phénomènes extraordinaires, les indicibles souffrances de la multitude. Il faut rendre cette justice à Jean Chuffart; il ressent les calamités des peuples
et en a une réelle compassion. C'est, ce semble, ce sentiment qui a déterminé le parti politique auquel le chroniqueur est resté attaché toute sa vie. Il est cabochien, démocrate, jusqu'à pallier les excès les plus violents de la démagogie, tels que les massacres de 1418 : il ne perd pas une occasion de faire ressortir le commun, c'est-à-dire le parti populaire.
  Cabochien, il est comme son parti dévoué à Jean sans Peur, et pour venger sa mort il embrasse le parti de l'Anglais. Ses sympathies pour le duc Philippe sont moins vives que celles qu'il a éprouvées pour son père ; elles existent cependant, quoiqu'il s'en plaigne et le blâme dans certaines circonstances. Plus Bourguignon qu'Anglais il fait de la domination des insulaires un résumé qui témoigne que, s'il lui fut d'abord attaché, il en était pleinement désaffectionné lorsque Paris redevint Français.
  Oncques les Juifs, dit-il, qui furent menés en Chaldée en captivité ne furent pis menés que le pauvre peuple de Paris. Les Anglais furent moult longtemps gouverneurs de Paris, mais j'estime en ma conscience que nul ne fit semer ni blé, ni avoine, ni faire une cheminée, si ce n'est le régent, lequel faisait toujours maçonner... Les Anglais de leur droite nature veulent toujours guerroyer leurs voisins sans cause; par quoi ils meurent mauvaisement, car alors (en 1436), il en était mort en France plus de soixante-seize mille.
  Ceux que Chuffart déteste du fond de l'âme, ce sont les Arminags et leur chef, Charles de Valois. Sa haine est vivace et perce alors qu'il cherche à la dissimuler. Les Armagnacs en devenant maîtres de Paris sont devenus les Français, et le Dauphin viennois s'appelle Charles VII. Le ton du chroniqueur change, pas assez cependant pour dissimuler le démocrate qui se trahit pour quiconque sait lire. Charles VII ne lui est guère plus sympathique que Charles de Valois. Ne pouvant pas décemment s'en prendre au roi, il s'en prend à ceux qui le tiennent « comme on fait un enfant en tutelle ». Même le recouvrement de Rouen ne le fait pas sortir de ces dispositions de mal content.
  Chuffart est tout dévoué à l'Université dans laquelle il tient un rang si élevé. A ses yeux c'est la grande autorité doctrinale. Quoiqu'il ne semble pas qu'il se soit engagé dans les funestes discussions dogmatiques par lesquelles l'Université de Paris détruisait ladivine constitution de l'Église, l'on ne peut pas douter qu'il n'ait partagé les sentiments de ses collègues.
  Ces dispositions de Chuffart étaient dans toute leur véhémence lorsque la Pucelle vint ramener la victoire dans les rangs de ces Armagnacs dont Chuffart avait décrit avec une si manifeste complaisance la défaite à la journée des Harengs. Chuffard, comme l'Université entière, était incapable de voir le miracle de Dieu. La Vierge est celle qu'aux bords de la Loire l'on appelle la Pucelle. C'est une créature en forme de femme qui est, Dieu le sait. Les merveilles qui ont marqué son enfance et sa jeunesse se racontent à Paris. Privé de tout moyen de contrôle, Chuffart n'en écrit pas moins que tout cela est controuvé. Il tait les exploits de l'héroïne au point de ne pas même mentionner le sacre de Reims. Ce sur quoi il s'étend, c'est l'échec contre Paris, ce sont les crimes imputés à la Martyre par l'inique tribunal.

  Chuffart est un témoin précieux de la haine des Parisiens, et surtout de l'Université, à l'encontre de la Libératrice.

       

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Source : introduction de J.B.J. Ayroles, "la vraie Jeanne d'Arc", t.III, p.513 à 530.
Mise en Français plus moderne : J.B.J. Ayroles, ib.


Texte original et notes d'érudition : "Journal d'un bourgeois de Paris" - Alexandre Tuetey - 1881.





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